Il était une fois une planète. Sur cette planète
vivaient des animaux, des végétaux et des capitalistes.
Les animaux naissaient, bouffaient, étaient bouffés
et se reproduisaient selon la volonté du Créateur.
Les végétaux poussaient, pistillaient partout et
se faisaient brouter par les animaux, voire fumer pour certains.
Bref, tout se passait bien, si l' on excepte de menus rapports
conflictuels entre carnivores et végétariens.
Les capitalistes contemplaient ce spectacle d' un il torve,
en se désolant de sa gratuité."Après
tout, n' y aurait- il pas de l' argent à se faire ? "se
disaient- ils, sous leur haut- de- forme, entirant de langoureuses
bouffées sur leur cigare cubain, qu' ils se procuraient
malgré l' embargo.Ils décidèrent alors de
se réunir et de se faire une bouffe, car " si ventre
affamé n' a pas d' oreilles, les gros comptes en banque
font les panses repues " ( proverbe suisse ).Gavés
de mets au coût prohibitif, la glotte guillerette à
force de bons crus, mis de joyeuses humeurs par quelques blagues
phallocratiques un tantinet racistes, nos capitalistes se mirent
d' accord sur l' essentiel. Désormais, tout serait payant.
Et payable à eux.
Pour cela, ils inventèrent la libre concurrence, qui impliquait
la diversité de choix, de prix et ferait croire aux crétins,
aux abrutis et aux socio- démocrates que la liberté,
c' était l' économie libérale. Car les capitalistes,
malgré tous leurs défauts, avaient compris bien
des choses. Ils se savaient peu nombreux à profiter du
système et devinaient qu' en arnaquant de façon
trop voyante leur cheptel de consommateurs, ils couraient le risque
de se faire un jour mettre les couilles en sautoir par des hordes
de prolos hargneux, vindicatifs et allumés au vin de table
coupé au méthanol...Si, si, ça s' est déjà
vu
Ils inventèrent alors le capitalisme d' état
( ou communisme ), l' assiégèrent dans un seul pays,
d' ailleurs peu réputé pour ses traditions humanistes
et le transformèrent avec l' aide du génial camarade
Staline en un repoussoir efficace pour tout esprit normalement
constitué, voire pour un trotskiste.
Mais ce système finit par se casser méchamment la
gueule chez les Russes. Et s' adapta chez les Chinois. Les capitalistes
avaient cependant déjà réfléchi à
d' autres moyens d' enrayer d' éventuelles contestations
: Loto, football, PMU, congés payés, crédit,
Loft story, Combien ça coûte ?, Roland Garros, pornographie,
voiture individuelle et comités d' entreprise, autant de
merveilles scintillantes qui faisaient naître sur les faces
burinées des damnés de la terre un sourire béat.
Le spectacle bourgeois, vaseline des enculeurs du peuple...
Pendant ce temps là, les capitalistes se goinfraient,
déforestaient, polluaient, guerroyaient, spéculaient,
exterminaient animaux et végétaux, et de temps à
autres faisaient tomber des miettes de la nappe pour les nécessiteux
de leurs contrées, réduits au chômage par
leurs délocalisations et leur appétit sans cesse
grandissant de profits et de pouvoir. Et comme une bonne idée
reste une bonne idée, ils décidèrent de se
voir régulièrement afin de comparer leur embonpoint
respectif. Ainsi naquit le Groupe des Huit.
Et ils vécurent pétés de pognons et exploitèrent
des millions d' enfants.
Maintenant, au lit. Demain, y' a usine.
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